Éthiopie: À Adiaser, dans le Tigré, les habitants se sentent cernés par l’ennemi

Un an et demi après la fin de la guerre et un accord de paix, le Tigré, dans le Nord de l’Éthiopie, est toujours face à d’immenses défis. Le conflit avait opposé les Tigréens au pouvoir central éthiopien, allié de l’Érythrée voisine et d’autres régions comme les Amharas. 

La guerre de 2020 à 2022 aurait fait au moins 600 000 morts, selon l’Union africaine, avec des soupçons de génocide. Aujourd’hui encore, le Tigré est en partie occupé par les Amharas et les Érythréens.

Adiaser se trouve dans l’Ouest du Tigré, à quelques kilomètres de la zone conquise par les Amharas et de la frontière Erythréenne. En ce jour de marché, les étals sont là, mais les marchandises ont changé. La plupart viennent de l’Est du Tigré, car les échanges avec l’Ouest sont impossibles.

À quelques kilomètres, la rivière Tekeze sert de frontière naturelle avec la zone occupée par les Amharas. Brago Brazgi vend du sésame et se sent totalement cernée : « Nous sommes entourés d’ennemis. À l’Ouest, les miliciens Amharas, au Nord, les Érythréens. Nous dormons mal.

Nous avons peur qu’ils nous attaquent de nouveau. » Elle poursuit : « Avant la guerre, les Tigréens vivaient à l’ouest de la rivière, ils cultivaient leur terre, maintenant ce n’est plus possible. On nous a pris notre territoire par la force.

J’avais d’ailleurs beaucoup de clients de l’Ouest. Maintenant, ils sont tous dans des camps de déplacés. » Les autorités tigréennes avaient annoncé un retour des déplacés pour le 7 juillet. Mais ils sont encore des centaines de milliers dans des camps.

Des habitants terrifiés qui demandent un retour aux frontières d’avant-guerre

La défiance vis-à-vis des voisins se mêle à la terreur pour certains. Dans son atelier de couture, Beriu Futuwin raconte les crimes des Érythréens et sa peur quotidienne depuis lors : « Les Érythréens ont tué un de mes oncles, sa femme et leurs enfants. Ils ont pris toutes mes machines et mes tissus. J’avais fui dans la brousse et je suis revenu après l’accord de Pretoria. Mais pour l’instant, j’ai peur chaque jour. Je ne serai en confiance que quand nous récupérerons l’Ouest. »

Dans sa boutique, Kashi Alam raconte comment les Érythréens ont tué neuf de ses voisins pendant la guerre, comment il a fui en brousse pendant deux mois. Aujourd’hui, il demande qu’on chasse les envahisseurs pour que le Tigré retrouve ses frontières d’avant-guerre : « J’ai entendu des rumeurs sur un éloignement des Amharas. Mais pour l’instant, tout reste fermé. L’ouest de la rivière Tekeze, c’est le Tigré. Jusqu’à Bar Assalam, Tsegede, Almacho, Humera, tout cela nous appartient. En attendant que cette terre soit libérée, on ne s’éloigne pas d’ici. »

À l’Ouest et au Nord d’Adiaser, l’armée fédérale a dressé des barrages. Quasi rien ne transite et les soldats servent de tampon entre les forces tigréennes et leurs voisins. Selon les autorités du Tigré, l’accord de paix prévoit un retour aux frontières d’avant-guerre. Elles accusent le pouvoir fédéral de manquer de volonté politique pour dire à ses alliés et leurs troupes de rentrer chez eux. 

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